Née à Hualien en 1977, Tseng Mei-chen (曾美禎) se passionne pour la littérature et l’art dès son jeune âge. En 1996, elle rejoint la faculté d’anglais de l’Université catholique Fu Jen où elle étudie la littérature anglaise. Avec un fort désir de découvrir le berceau de la Renaissance, elle part en Italie après l’université et est admise à l’Académie des Beaux-Arts de Florence en 2001. L’année suivante, elle est transférée à l’Académie des Beaux-Arts de Rome où elle se spécialise dans la peinture à l’huile et dans la gravure. Sa pensée esthétique est ainsi profondément influencée par l’art florentin.
Après 2004, Tseng Mei-chen s’est progressivement tournée vers la gravure sur bois comme sa principale forme d’expression artistique. Elle étudie auprès de Francesco Parisi, un graveur sur bois européen de renom. Elle raconte avoir décidé sa carrière de toute une vie après avoir essayé pour la première fois la gravure sur bois. Une fois diplômée en 2006, elle décide de délaisser la peinture à l’huile pour s’adonner entièrement à la gravure sur bois. Elle a établi son atelier à Rome, aspirant à devenir une graveuse sur bois de premier ordre à l’international.
La gravure sur bois utilise des blocs de bois en coupe transversale (la gravure traditionnelle utilise des blocs longitudinaux). La texture de ce genre de bois étant plus dure, il est ainsi nécessaire d’utiliser un couteau à graver en forme de diamant souvent utiliser sur les plaques de cuivre pour créer l’image, ce qui donne un fond noir avec du texte blanc. Grâce au matériau dur, des courbes régulières et délicates peuvent être sculptées, permettant l’expression de la lumière et de l’ombre à travers des lignes fines.
La gravure sur bois est relativement rare à Taïwan mais constitue un médium important de gravure en Occident. Pour Tseng Mei-chen, le contenu narratif, la structure des lignes et la technique du couteau représentent les trois principaux éléments de la création de gravures sur bois. Elle estime que les fines lignes et la possibilité de créer des images superposées permettent aux graveurs de façonner des images riches et vives en profitant de la vitalité et la ductilité du bois. Par conséquent, la gravure sur bois est particulièrement adaptée aux œuvres narratives et aux séries d’œuvres.
Tseng Mei-chen a indiqué qu’elle apprécie surtout les lignes des gravures sur bois pour leur netteté, leur finesse et leur côté direct tout en étant capables de créer des images de plusieurs couches et diversifiées. Sans la distraction de couleurs, toutes les nuances d’obscurité et de profondeurs résultent de variation de lignes, ce qui affiche avec évidence toute la maîtrise technique de gravure, sans possibilité de se cacher.
Pour Tseng Mei-chen, la gravure sur une planche de bois s’assimile à une conversation avec le bois. Cette relation entre l’artiste et son matériau aboutit à un équilibre entre le mouvement du couteau et la résistance naturelle du bois, presque comme un effort commun pour accomplir une œuvre. De ce point de vue, même si un bloc de bois n’est pas parfaitement assemblé ou possède des imperfections et des fissures, il est possible de considérer que le bois façonné par le temps et la température participe à la réalisation de l’œuvre.
Tseng Mei-chen a l’habitude de transmettre ses émotions accumulées à travers des œuvres en série. Ses images sont souvent riches en histoire et en narration. Forte de sa formation en littérature anglaise, elle puise souvent son inspiration dans la littérature tragique pour créer des œuvres sur le thème des écrivains existentialistes tels que Sartre, Nietzsche et Kafka, en réalisant une série de portraits. Elle a également réalisé une série intitulée « Médée », inspirée des riches descriptions psychologiques du personnage principal éponyme de la littérature grecque antique.
La plupart des gravures de Tseng Mei-chen représentent des interprétations du corps humain : le corps, le visage, les mains, le regard, des portraits et les expressions déformées, tous exprimés à travers des lignes gravées. En plus de cela, elle crée également des œuvres de paysages, des interprétations de l’environnement, des natures mortes ou encore des objets. Dans ses œuvres, en plus des portraits européens, figurent aussi de nombreux éléments de Taïwan, comme les chants et les danses du groupe autochtone Tao de l’île des Orchidées et le groupe de performance de percussions U-Theatre.
Tseng Mei-chen qui a participé à de nombreuses expositions internationales jouit d’une certaine renommée dans le domaine de la gravure. Ses créations ont un style unique. De 2007 à 2011, elle était de retour à Taïwan, période durant laquelle elle a assuré enseigné au département d’italien de l’Université catholique Fu Jen et à l’Université nationale des arts de Taipei. Par la suite, elle a décidé de retourner en Italie et s’est installée à Rome pour se consacrer à nouveau à la gravure.